Ces jours-ci et sur le net on ne peut être sûr que d'une seule chose : c'est qu'on vient d'atteindre la scène de la farce totale. En effet, depuis que la crise financière surpeuple les médias - lesquels s'en goinfrent comme de paroles pour se boursoufler et occuper tout l'écran ou le moniteur - on assiste à un déchaînement d'expositions de scénarios délirants, et forcément sur le mode catastrophique du gore.
Qui de mettre en une des photos en noir et blanc, surtout noir, avec des effets de gros lettrages massy en mauvaise surimpression de krach, qui se répéterait uniquement pour survendre le papier de la planche à journaux. Qui encore de rameuter tous ses rédacteurs pour vite ficeler je ne sais quel numéro spécial gouffre, comme un polar bâclé du grand soir dont on vous assure qu'il est apposté juste au lendemain. Qui d'annoncer pis encore, tous conseils qui se précipitent résolument au rebours de ce qu'il conviendrait, et manifestement pour installer une scène du désordre scandaleux qui est vraiment trop bon pour les affaires de la Presse instantanée.
C'est une débauche de Presse papier tout comme de la Presse internet : quand dans les temps placides et creux, elles se font une guerre jalouse dans les couloirs orduriers du web. C'est pourquoi, quand nous voulons nous informer : nous nous sentons nager à contre-courant ou dans un fleuve de béton qui prend. Soit dans une époque d'irresponsables qui jouent à la roulette webique des annonces fausses et grandiloquentes qui trompent, qui bluttent et qu'elles pipent le lecteur volontairement à celle fin de l'accrocher par tous les fils de la peur.
Ceux qui écrivent ces attentats parliers contre le sens commun mettraient littéralement des vies par milliasses en danger. S'il n'était ce calme impavide de la foule sagement inerte qui écoute plus sûrement son argent ronfler dans le calme des dépôts préservés. Plutôt que cette foule confierait ses économies et son matelas à des experts ès hâtiveté de parleries... et tout pour néant.
Souvent, l'inertie du sage paysan sauve des gesticulations épileptiques des intellos du zinc du café du commerce qui donne vastement sur la rue de la maleplace. C'est là que sont les bureaux et sièges troués des journaux citoyens participatifs du grand bordel qu'ils souhaitent, qu'ils veulent et qu'ils tentent de l'installer partout.
Franchement, pensez-vous un seul instant même quand vous seriez trop pris dans la vôtre névrose de web addict, que quiconque prêterait une manière d'oreille attentive et sérieuse à ces faux experts improvisés dans leurs galetas d'oisifs juste reliés à leur ADSL, qui serait leur seule légitimité pour fiche un système mondial par terre ?
Sur le net, n'importe quel étudiant en sieste digestive de ses tripes peut vous pondre un article pompé de moitié dans la Presse du cirque Boursorama, et qu'il peut proposer cette bouillie pour tchat à des journaux à l'esthétique d'agonie comme Agoravox. Et qu'ils seront publiés dans la journée par des comités d'experts en dépêches de faux-derches inconnus ou anonymes.
S'agit-il encore de Presse ? ou de pyromanie verbale pour mettre le feu en tout bon lieu où l'on craindrait qu'il s'éteindrait et que l'audience partirait aussitôt, comme Virgile vit la Justice quitter le Monde. La Presse participative ou citoyenne craindrait-elle l'eau pour se laver à tout le moins ?
Tout ce qu'on peut constater : c'est que ces officines, aux teintures de vautours jamais repus de crashes et de kraches, distribuent la terreur et qu'elles jouent donc sur le court terme, et sans la moindre prise en compte d'une société qui voudrait s'espacer dans le futur. Les journaux de la peur aiment les lecteurs terrorisés.
Leurs instances semblent des nihilistes écrasés par leur besoin d'argent frais publicitaire. Et qu'ils ne voient pas plus loin que la nuit qu'ils espèrent passer dans leur confort de petits agitateurs de Presse expérimentale, paumée à des milliasses d'années-lumière de la vraie Presse, qui se sait nous informer des événements tels quels du jour.
Finalement, cette Presse participative du net confond les analyses prospectives avec des discours post-médiévaux de prophètes occultes et manipulateurs pour leur seul profit. Sartre disait que les mots sont des pistolets chargés : la Presse citoyenne ou participative n'aime jouer que d'une seule balle dans le barillet à roulette. Et cette balle, aussi définitive que la plus grande menace toujours calquée sur le crash des Twin Towers, claque comme un discours le plus bref et sans avenir. Quand la balle a atteint sa cible, soit quand le journal a annoncé ou menacé du pire lendemain, on sait bien qu'il n'y aura plus de second ni de tierce coup.
Alors, le lecteur en vient naturellement à ne plus croire en ces annonces exagérées et donc toujours avortées. Et c'est la Presse qui perd, car le lectorat doutera naturellement de tous propos qu'elle diffusera à l'ensuite. C'est tout l'oeuvre du journalisme dit "citoyen" : qu'il détruit systématiquement la foi ou la créance que le citoyen aurait en la Presse.
Finalement, cette crise de la finance manifeste plus encore une crise de la Presse qui est probablement plus grave encore, puisqu'elle touche et ruine l'esprit.
Demian West
Tuesday, October 07, 2008
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