Tuesday, January 08, 2008

La conférence de Presse du style Sarkozy


Quand il prit le pupitre d’un air narquois devant la pléthore de journalistes attablés au festin de Don Juan ou du Commandeur, Sarkozy lâcha sa première flèche du style. Il savait que tous l’attendaient et en premier rang les journalistes pianotant sur leurs portables en lien avec la blogosphère des fines lames au clair.

Tout d’abord, on l’entendit marteler les termes de "politique de civilisation". Un truc bizarre que nul ne s’expliquait auparavant. Puis, lentement la chose prit une forme d’une idéologie d’un axe atlantique et comme si le capitalisme devait tourner en quelque intéressement pour tous. Une nouvelle forme de l’ultra libéralisme ouvert aux masses de la gauche prolétarienne introuvable.

Mais, ce qu’on entendit le plus, c’est ce style si direct et en langage parlé qui sut prendre l’auditeur ou l’interlocuteur au collet. Comme un maître d’école de choc saurait capter l’audience et l’attention de la salle entière. Vrai, qu’il a su tirer des sourires savants et des assentiments aux journalistes, presque forcés par ses effets de manches de la séduction.

C’est manifestement un Président sportif accoutumé à la course de fond au coin du bois. Car l’épreuve est grande. Il faut tenir un discours tendu et tout du long. Avec quelques faiblesses, auxquelles il sut vite et savamment donner des teintures bien humaines. Tant et si bien qu’on avala presque tout comme argent comptant. Car il affirma sans cesser, qu’il ferait tout son programme et sans que rien n’y manquerait. Aussi, son programme contient-il des équivoques étranges sur les termes de l’identité, ou "savoir ce que nous sommes", selon l’acception donnée par Sarkozy.

Par moment, on voulut sortir comme épuisé par ce discours qui annonça tellement de réformes qu’on sentit bien qu’il y faudrait dix ans, à tout le moins, pour y parvenir. Et que Sarkozy y prétendit le faire cette année même. C’est ce vertige qui nous donne tantôt l’impression d’un Président qui sait engueuler la masse d’inertes ci-devant lui. Et qu’on les appelle au centre ville la critique et les sondages qui baissent. Bref, ce fut l’électrochoc balancé par Mista sourire en coin et à l’américaine, comme il convient au style nouveau.

En ouverture des questions, Sarkozy affirma qu’il préférait les excès de la Presse à ses absences. Puis, vint la question que tous attendaient et posée par France 24. Le mariage ? et pour quand ? Et le Président de répondre sur un ton sensible et blessé, dans une tirade contre la Presse people et les manoeuvriers photographes du buzz, sans donner la date ni la réponse. Juste : "C’est du sérieux" et "...il y a de fortes chances que vous l’appreniez quand ce sera déjà fait." Aussitôt on s’interrogea dans la salle : "Peut-être est-ce déjà le cas ?". Mais non ! Quel journaliste pourrait-il tenir tant de frayeurs sentimentales et passionnelles en si peu de mots et à flux tendus vers le monde entier ?

Ensuite on parla d’autres choses moins émouvantes, car tout était dit du thriller pour lequel tous se furent déplacés. On passa vite sur la fin des 35 heures qui est une antienne du discours politique, pour cacher le moindre paiement des heures sup’. On laissa aux journalistes qui aiment à jouer, la fin de la pub sur la telly de service public, que nul n’avait su anticiper. Le scoop était là ! mais en parergon du mariage introuvable. Car, on osa deviner un peu au regard humide et sensible de l’homme désirant et amoureux, que la belle n’avait pas, peut-être, entièrement dit "oui". Ce qui devait réjouir tous les jaloux en attente de l’échec d’autrui, comme Sarkozy l’insinua lourdement, dans ce théâtre de la cruauté feutrée si parisienne.

Plus sérieusement, les journalistes tentèrent de percevoir cet ensemble de "politique de civilisation" par ses bouts que nuls ne saisirent vraiment. Car selon Sarko, c’est un ensemble de mesures qu’il faudrait mener toutes à la fois et sur tous les aspects du changement contre le conservatisme, et pour rajeunir la France. Certes, il y avait là beaucoup de bonnes intentions et du punch. Mais, devant un parterre assez médusé et apparemment inerte, hormis dans les bancs de quelques ministres tétanisés par le goût excitant de chantier des cinq ans à venir.

La question de la politique étrangère se résuma au vieux ressort dérouillé qui sortit à reprises son Khadafi de la boîte de Pandore. Celle des entregents maquilleurs de la diplomatie cynique et qu’ils sont forcément nécessaires, pour tous les Princes florentins comme Sarko. On pensa même entendre des complexions angéliques de Poutine, si naturellement dépeintes par un Sarkozy vraiment en habileté d’inventions.

Vrai, qu’il sut plus habilement encore justifier sa volonté de discours devant le parlement, comme la fin d’un hypocrisie et le début d’un vrai débat entre le Peuple et son Président. Quand on suggérait plutôt une manière camouflée d’une immixtion venue à droit fil d’un "hyperprésident", et très connoté à droite pour ce coup-là. Vrai aussi, que Sarkozy sut retirer les mots douloureux de l"identité nationale" et de la "discrimination positive", qui furent des excès un peu trop honteux désormais. Toutefois, les mots changent mais la réalité de l’action persiste, manifestement.

Le gros coup en guise de pétard mouillé vint de Joffrin de Libération qui balança le vieux reproche d’une glissade vers la monarchie, en France. Et Sarkozy de réfuter toute référence à une dynastie, et surtout pas la chiraquienne. On s’en doutait. La question du pouvoir personnelle fut écartée en un tournemain, par celui qui fut tout de même élu par la majorité des Français (il rappela les chiffres qui font mal à l’opposition réduite en plates-bandes à gauche). Et surtout, que la Presse ne cesse d’asseoir le pouvoir personnel de Sarkozy, à tout le moins dans les covers des médias et des tabloïds et sur le ton critique qui alimente le théâtre pipolitique déchaîné. Que de flatteries et de coups bas à fleurets rangés au premier sang versé, assez bleu tout de même. Bref, on rappela en chaire présidentielle, la nécessité du Premier Ministre et de son action difficile. Avec un certain ton de commisération, qui relançait la prime question pour laquelle Joffrin était venu.

Ensuite, on disserta comme en licence de philo au sujet d’Edgar Morin, l’inventeur du concept de "politique de civilisation", désormais sarkozyste. Le fond de la question brassait un fort désir d’enthousiasme. Et que c’est probablement d’une nouvelle énergie dont la société française avait besoin, pour croire en elle et en son avenir tunnelier. Et surtout, quand le Peuple attend plus encore de pouvoir d’achat et immédiatement. Et non pas au terme de toute la liste des commissions des promesses, qui venaient d’être données par le Président, qui a certainement d’autres courses en provisions politiques.

A la fin de ce devis, ce qui ne laissait de paraître, ce fut cet esprit d’aplomb et de répartie mordante semblable à celui d’un jeune Président assez porté par ses réussites et son énergie amusée et réjouie par le travail qui l’attend... et son mariage vénusien. Tant et si bien, qu’on pouvait y voir cette marque des grands, qui sont stimulés par l’épreuve et par les oppositions. Car, ils se plaisent à les contourner et parfois à les ignorer. Et tout pour vaincre non pas une seule fois, mais en permanence. Et c’est raison pour laquelle ils se sont, toute la vie, hissés vers ce plus haut siège des responsabilités et des jouissance du pouvoir.

Demian West

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