L’indestructible Jörg Immendorff est mort. Il avait commencé à peindre comme un sale gosse de la peinture qui fait des taches à l’université où le prof Beuys s’attaquait à l’institution. Puis, Immendorf se sentit l’âme de la tradition. Mais plutôt de la coutume des barbares allemands qu’on appelait de l’art dégénéré : les Nolde ou Macke et les Franz Marc.
A l’époque, et après la leçon de Gauguin, ces artistes cherchaient à retrouver la barbarie primitive pour recommencer la civilisation qui se suicida en 1914. On cultivait le naturisme et les modes proches de la nature dans l’art aussi : gravure sur bois et dessin brutal sans raffinement cultivé. L’oeuvre d’art devait exprimer l’individu et ses sentiments irrationnels. C’est pourquoi, on y voyait des maisons tordues et des personnes déchirées, comme dans "Metropolis" de Fritz Lang ou dans le "Nosferatu" de Murnau.
Dans les années 70 et après la vague conceptuelle et abstraite, Immendorff et ses complices braqués Baselitz et Lupertz constituèrent l’école post-moderne des néo-expressionnistes. Plus tard, on les appela les "nouveaux fauves", comme Matisse et Vlaminck avaient succédé au symbolisme de Gauguin. Ces noms balancent encore la couleur à plein pot. En des annonces de statues en bois brut, que ces artistes taillent au hachoir si rugueux des Afriques germaines. Immendorff et ses potes furent des infréquentables qui se révoltèrent contre l’abstraction et contre l’art conceptuel qui les ennuyaient, franchement dit. Il s’amusaient plus au dessin et aux images, qui étaient leur vrai truc bien gras mais tout bouleversé et strident.
Voyez ! Baselitz peignait des sauvages allemands à l’envers, la tête en bas. Avec plein d’insinuations qui fâchent. Et pour vendre ces oeuvres farouches sitôt sorties de l’atelier, aux golden boys en débords infinis de tune. Immendorff illustrait carrément des sortes de cafés berlinois, sortis à droit boulevard du réalisme des années 30 de Grosz ou de dada. Avec des figures réelles des déformations médiévales qui courent encore dans les rues de la GrossStadt des prostituées et des arsouilles. Ce fut le retour dur du réalisme critique mêlé à l’expression des pulsions du peintre qui doivent sortir par le pinceau.
Il a peint d’autres séries de cafés dont le Flore à Paris. Et, il y ajouta toutes sortes de délires illustratifs de nos villes traversées par des individus en errance, et dans des couleurs violentes si sombres que jamais trop réfléchies ou rationalisées. C’est du brutal et il y a de la bière dedans.
Car, la peinture allemande est dure avec l’Allemagne qu’elle maltraîte. Et pis encore, longtemps après la Guerre mondiale quand ça vira au masochisme dans les années post-68. Dans les années 80, on se lâcha partout. Et, les néo-expressionnistes explosèrent enfin dans la sphère people de l’art. Bagues de pachas turcs aux dix doigts et grosse Mercedes caressée aux chromes, Immendorff frimait en nouveau riche avec Baselitz et Lupertz, dans les boîtes de la longue nuit allemande de l’après-guerre. Ils ont tout goinfré en persillant du scandale partout, comme des stars de rock sorties de la fabrica Mick Jagger. Vrai ! Immendorff fut même surpris dans une chambre d’hôtel avec 9 prostituées. Pour la photo de l’actualité des arts, où il sut quand même tirer la glossy couverture à lui. Soit à sa réputation qui persista comme le soufre du plus institutionnel Méphisto.
Ce qui laisse entendre qu’en Europe nous avons nos Amériques, qui n’ont rien à envier aux Indiens. Et que nulle convention ne saurait jamais les réduire, par le fait de l’art qui autorise tous les excès libératoires. Immendorff était cet artiste allemand de l’après-guerre qui voulait s’exprimer sans frein et sans égard pour les limites et la maladie. Ce très grand peintre savait se lâcher : ce qui n’est pas si aisé. Il vient de s’affranchir de la dernière limite.
Demian West
Expressionnisme :
Extrait de "Metropolis" de Fritz Lang. "Moloch".
http://www.youtube.com/v/P6cF_1zQ5MU
Tuesday, May 29, 2007
Subscribe to:
Post Comments (Atom)
No comments:
Post a Comment