Sunday, January 04, 2009

Les journaux meurent comme les civilisations

Qu'on se souvienne ! Il y a peu, autour des élections présidentielles en 2007, on pouvait entendre dans la blogosphère des tentatives de mouvement de masse pour créer une sorte de 5ème pouvoir. Il s'agissait d'une manière de rassemblement de volontés assez jeunes pour constituer un contrepoint collectif aux médias traditionnels, et pour en démontrer les manoeuvres perverses et manipulatrices.

Ce qui frappait d'abordée dans ces manifestations sur le mode journalistique, ce fut la posture radicale et nommément "révolutionnaire". Mais, toute avancée par des personnes à teinture de bourgeoisie et la plupart du temps bien-vêtues d'habits tout semblables à ce qu'elles prétendaient dénoncer.

Il y avait le journal du net "Agoravox" et d'autres satellites, qui singeaient tous les systèmes cosmiques qu'on voit dans les médias traditionnels, entre télévision, journalisme et conférences de la Presse qui se dit plus grosse que le boeuf, comme la grenouille de la fable. En d'autres termes, le ton et les apparences à la tribune n'étaient pas neufs mais plus de la pantomime, qui se sait entrer dans les vieux habits ou vieilles chaussures des trop grands rôles pour en obtenir tous les avantages.

Certes, le principe de ce 5ème pouvoir était de donner la parole à tous. A l'inverse de l'architecture d'un "Facebook", chacun pouvait visiter le forum et y lâcher sa bombe qu'il voulait juste pour voir l'effet que ça faisait de se moquer d'un intellectuel ou de traiter un artiste de sybarite efféminé, ce qu'on comprendra bien signifier une sorte d'injure.

L'avantage de ce dispositif c'est qu'il attire le plus grand nombre et que pour paraître un gros boeuf c'est la méthode. Hormis que les boeufs n'ont du pouvoir que dans les bouseries malodorantes. Et que ce populisme est depuis longtemps perçu par nos philosophes, comme une utopie qui verse vite dans la dictature du n'importe qui.

C'est ce qui se produisit dans ce mouvement que ses fondateurs avaient appelé la "Révolution du pronétariat". Une belle formule qui s'est achevée en ce seul jeu de mot tout pour néant, quand la concurrence de "Rue89" ou "LePost" réduisirent l'espace de cette idéologie étrange. Alors, dans les colonnes de cette agora des pronétaires, on n'y vit plus que palabres grossiers et règlements de comptes en guise de forums, et partout le monochrome idéologique du tout-sauf-Sarko.

Plus récemment, cette Presse groupusculaire inventa et voulut imposer une sorte de critère ou label d'information véritable. Deux ou trois enseignes se sont donc accouées par toutes queues, pour créer une sorte de groupe de pression qui saurait nous dire ce qu'il faut comprendre comme étant la vraie info libre et bien balancée. Mais, qui dira le critère en préalable des référents, qui doivent ensuite dire la qualité de l'info ? N'était-ce pas le lecteur qui devait en juger a fortiori, selon l'énoncé du projet-même ? et ce lectorat ne devait-il pas exprimer son jugement et les référents de la bonne info dans les forums ?

Cette volonté du sommet pronétaire de dire les référents de l'info semble donc une sorte de velléité d'hégémonie sur toute la Presse du net. Ce semble une tentative d'O.P.A., mais jetée par ceux-là-mêmes qui voient leur espace journalistique se réduire en peau de chagrin. Et donc, la tentative dégage tout le parfum d'une dernière folie de braverie, qui paraît au lecteur froid assez désespérée. Et dans ce sens, c'est une entreprise autoritaire et sans moyen, certainement vouée à l'échec et d'arrivée.

Le journal "Agoravox" et "Bakchich", entre autres, voudraient rallier tous les journaux citoyens pour se laisser accroire encore un peu de temps, qu'ils auraient quelque chance et bonheur miraculeux de se constituer unilatéralement en seuls référents de l'info sur le net. Alors que c'est la grande liberté et sur le mode assez libéral, qui règne dans la blogosphère. Le plus fort et le plus vif, ou le plus attentif à son public gagne ! Tout comme dans le monde d'avant.

Et ne nous y trompons pas, ce sont les mêmes nerfs de l'ultra-libéralisme et du profit qui agitent ces journaux qui se voudraient des parangons de la parole collective, et tout pour leur profit de quelques-uns peu nombreux au sommet. Finalement, "Info-Vox" est voué à l'échec et il suffit de lire les espaces vides des forums de ces journaux pour saisir que, sur le net, la modernité va vitement et qu'un train de retard peut vous faire perdre toute la ligne et finalement le réseau entier.

Les journaux tout comme les civilisations naissent et meurent. Et plus sûrement, quand ils se coupent de leur public et des jugements des lecteurs... qui ont tout de même comme première qualité de savoir lire.

Demian West

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